lundi 12 août 2019

En Roumanie, les travailleuse de l’industrie de l’habillement touchent 14% du salaire vital

14% du salaire vital, c’est ce que touche en Roumanie les travailleuses de l’industrie de l’habillement ! Ce chiffre est relevé dans le nouveau rapport d'achACT. Dans le monde, la plupart des travailleuses et des travailleurs de l’industrie de l’habillement ne gagnent pas un salaire vital. Et c’est aussi le cas en Europe et notamment en Roumanie. Le salaire y correspond à peine à 14% du salaire qui permettrait à leur famille de vivre décemment. Pour survivre, beaucoup doivent travailler sur le côté, emprunter de l’argent ou compter sur l’aide d’un proche qui migre à l’étranger. Il est clair que marques et enseignes européennes d’habillement profite de cette situation.

La Roumanie, le plus grand pays de production de vêtements d’Europe

De nombreuses marques et distributeurs de vêtements d’Europe occidentale, de la fast fashion aux vêtements de travail, en passant par des enseignes de luxe, se fournissent dans des usines Roumaines1. Les vêtements "Made in Romania" sont destinés principalement à l'Italie, au Royaume-Uni, à l'Espagne, la France, l'Allemagne et la Belgique.


Photo Jošt-Franko

Dans une recherche menée en Roumanie par le réseau international d’achACT, la Clean Clothes Campaign (CCC)2, il ressort que les travailleurs et les travailleuses, largement majoritaires, ne touchent environ que 208 euros nets par mois, soit 14% d’un salaire vital3. Leur salaire n’atteint pas le salaire minimum légal fixé à 249 euros par mois en Roumanie, lui-même inférieur au seuil de pauvreté établi par l’UE pour ce pays (283 euros). Un salaire vital serait d’environ 1.448 euros nets par mois.

De nombreuses travailleuses interrogées témoignent des difficultés auxquelles elles doivent faire face pour subvenir aux besoins de leur famille. Leur revenu est bien souvent la source financière principale du ménage. Et pourtant, malgré les heures supplémentaires – souvent impayées - et le rythme de travail insoutenable qui affaiblissent leur santé, la plupart doivent recourir à des prêts d’argent pour pouvoir s’en sortir et faire face à des besoins de base tels que le loyer de leur logement, le chauffage et les soins de santé. La majorité cultive ses propres légumes et élève des animaux afin de pouvoir se nourrir. Des membres de leur famille n’ont d’autre choix que de migrer vers l’Europe occidentale pour trouver des emplois – souvent précaires- et aider ceux restés au pays.

« Comment vivons-nous ?! Comment peut-on vivre avec un salaire minimum ? Avec beaucoup de difficulté, bien sûr. Lorsque je perçois mon salaire, je rembourse les mensualités de mon prêt. Je paye 450 RON 4pour mon loyer, je paye mes charges et il ne me reste plus rien. J'appelle donc ma famille pour emprunter de l'argent à nouveau
», témoigne Silvia, une travailleuse interrogée pour la recherche.5


Le droit à un salaire vital, un droit humain bafoué dans l’industrie du vêtement

Des salaires de misère qui maintiennent les personnes dans la pauvreté, cela constitue une violation des droits humains très courante dans l'industrie du vêtement à travers le monde. Il s’agit pourtant d’un droit fondamental reconnu notamment dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme.6 Ce droit est même largement repris dans les propres codes de conduite des marques. Mais, faute de cadre contraignant, ce droit est loin d’être respecté. Pourtant, en vertu des Principes Directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme7, les entreprises ont la responsabilité de respecter les droits humains et de mettre en oeuvre une « diligence raisonnable ». Elles doivent ainsi identifier, prévenir et remédier aux risques de violations des droits, y compris dans leurs filières d’approvisionnement. Et, toujours sur base de ces mêmes principes, les États ont l’obligation de respecter les droits fondamentaux, y compris le droit à un salaire vital, et de les protéger, y compris contre les violations commises par des entreprises.

Ressources :
- La synthèse du rapport d’achACT sur la Roumanie en français se trouve sur http://www.achact.be/upload/files/presse_communique/romania%20country%20profile%2019%20fr.pdf
- Le profil complet sur la Roumanie, davantage d’informations et la liste complète des marques sont disponibles ici : https://cleanclothes.org/livingwage/europe/country-profiles/romania/view
- Pour plus d’informations sur le salaire vital au niveau régional européen : https://cleanclothes.org/livingwage/europe/

 1. Notamment Armani, Aldi, Asos, Benetton, C&A, Dolce Gabbana, Esprit, H&M, Hugo Boss, Louis Vuitton, Levi Strauss, Next, Marks & Spencer, Primark et Zara (Inditex). 2. Voir le rapport en anglais sur : https://cleanclothes.org/livingwage/europe/country-profiles/romania.3. Le salaire vital doit permettre de couvrir les besoins de base tels que le logement, la nourriture, les soins de santé, l’habillement, les transports, l’éducation et l’épargne.  4. Environ 94 euros. 5. Pour le témoignage complet de Silvia. 6. Ce droit est par ailleurs également reconnu dans la Charte sociale européenne.7. https://www.ohchr.org/Documents/Publications/GuidingPrinciplesBusinessHR_FR.pdf


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