mercredi 16 janvier 2013

Commerce équitable : Ayni Bolivia

En Bolivie, comme dans de nombreux pays d'Amérique latine et d'Afrique, l'artisanat traditionnel constitue l'une des principales sources de revenus pour les populations les plus pauvres des zones urbaines. Dans les campagnes, la production artisanale représente un complément de ressources important pour les communautés paysannes, dont les productions agricoles sont soumises aux aléas des marchés et des conditions climatiques.
 
La plupart du temps, ce sont les femmes qui créent ces bijoux, paniers, broderies, céramiques ou instruments de musique et les recettes de ces activités sont prioritairement affectées à l'éducation, à la santé et aux besoins quotidiens de la famille[i].
 

Vendre, le grand défi

Depuis quelques années, le travail artisanal à domicile en solitaire fait place progressivement à de nouvelles formes d'organisations collectives. Structurés en "comités", ces hommes et ces femmes se regroupent par métier et par spécialité avec comme objectifs un meilleur accès aux matières premières, l'échange de savoir-faire et de techniques, l'homogénéisation des gammes de produits et, plus largement, une amélioration de la qualité et une meilleure gestion des coûts de production[ii].

Si cette tendance à la professionnalisation des filières de production contribue de manière significative à la création de valeur et donc de revenus pour ces artisan(e)s, le fait est que la pérennisation et le développement de ces activités à fort impact social nécessitent d'accéder à de nouveaux marchés de manière durable. 

 

Equitable, c'est important

Créée en 2002 à La Paz, Ayni Bolivia est une société de commerce équitable qui s'est spécialisée dans la vente de vêtements et de jouets traditionnels créés au sein de communautés indigènes très pauvres (25 groupements représentant près de 200 familles) réparties dans toute la Bolivie, aussi bien dans les montagnes andines que dans les zones tropicales amazoniennes.

Membre depuis 2010 de l'Organisation Mondiale du Commerce Equitable (WFTO, ex IFAT), Ayni Bolivia développe ses activités dans le plus grand respect des principes et valeurs du commerce équitable.

Ainsi, l'entreprise assure à ses artisans fournisseurs des rémunérations nettement supérieures au salaire minimum légal ("Un salaire de développement pas un salaire de subsistance" comme l'explique Vania Rivero, le fondateur[iii]), auxquelles s'ajoutent les primes équitables spéciales (qui sont généralement consacrées à l'achat de médicaments, de matériel scolaire, etc.). Ayni garantit en outre la transparence absolue des conditions et modalités de vente (l'artisan connaît les marges de chacun des intermédiaires) et s'engage formellement en faveur de relations commerciales durables avec les artisans (garantie d'achat). Des actions de valorisation des savoir-faire et des cultures traditionnels sont régulièrement menées pour promouvoir les œuvres et créations des artisans qui sont par ailleurs encouragés et soutenus dans leurs efforts pour améliorer la qualité des produits finis (organisation de formations, conseils techniques, rémunérations spéciales, etc.). Enfin, une attention toute particulière est portée à la sécurisation des conditions de travail et à la protection de l'environnement (recyclage des matériaux, colorants naturels, économie d'eau et d'énergie).

"Le commerce équitable est entre vos mains", tel est le slogan de Ayni Bolivia qui brandit fièrement l'étendard de cette identité bolivienne traditionnelle, généreuse et solidaire.

 
Un impact social réel

Les activités commerciales d'Ayni Bolivia, que ce soit dans sa boutique de La Paz ou à l'export sur les marchés internationaux, génèrent des bénéfices sociaux très concrets pour les centaines de familles défavorisées qui en bénéficient. C'est le propre du commerce équitable de soutenir le développement économique et social des communautés de producteurs les plus exposées dans les pays en développement en les aidant à valoriser leur savoir-faire et leurs traditions.

La santé et l'éducation sont les domaines où la valeur sociale du commerce équitable est la plus importante pour ces familles indigènes menacées par l'extrême pauvreté. Les prix d'achat pratiqués par Ayni Bolivia sont calculés pour permettre à ces artisanes de financer l'accès aux soins de base pour leurs familles ainsi que l'inscription des enfants à l'école.

 
 
De nouveaux horizons

Afin d'assurer des perspectives durables de développement aux communautés indigènes avec lesquelles elle travaille depuis bientôt dix ans, Ayni Bolivia s'est engagée en novembre 2010 dans un ambitieux projet intitulé "New Hope" (Nouvel Espoir) avec pour objectif de commercialiser aux Etats-Unis les petites marionnettes indiennes traditionnelles tricotées par les artisanes de la communauté Aymara qui vivent à El Alto aux abords de la capitale, La Paz.

Or, mettre sur le marché aux Etats-Unis des jouets pour enfants, cela n'est pas si évident. Il convient en effet de répondre à un grand nombre de normes techniques et de sécurité afin de garantir le fait que ces petites poupées de laine tricotées que l'on enfile au bout des doigts pour raconter des histoires ne représentent aucun danger pour les petits de moins de trois ans qui en profiteront. Inflammabilité, résistance des matériaux, composition chimique, étiquetage,... les règles à respecter pour commercialiser des jouets pour les tout-petits sont nombreuses et complexes et exigent l'intervention d'agences et de laboratoires spécialisés pour obtenir les précieuses autorisations.

Soutenu financièrement par le Trade for Development Centre de la CTB, l'Agence belge de développement, ce projet "New Hope" s'inscrit dans la vocation sociale et solidaire d'Ayni Bolivia. Il vise en particulier à assurer des ressources et des emplois durables à la vingtaine d'artisan(e)s Aymara qui créent ces petites poupées colorées et l'univers enfantin dans lequel elles évoluent. Les enjeux sont très concrets. En effet, le projet prévoit que l'accès au marché états-unien permettra de doubler en l'espace de deux ans les volumes annuels vendus (de 2 500 à 5 000 unités), ce qui aura pour conséquence de pérenniser la filière de production garantissant ainsi des revenus et des ressources pour l'ensemble des familles Aymara qui vivent de cette activité.  

 
"Nous aimons notre Mère la Terre et nous voulons défendre et faire connaître notre culture et les savoir-faire de nos ancêtres". 

Vania Rivero, fondateur d'Ayni Bolivia[iv]

 

Pour en savoir plus :
- « Le commerce équitable et le commerce durable en Bolivie », brochure de 48 pages du Trade for Development Centre, décembre 2011.
- www.aynibolivia.com
- www.craftsfrombolivia.com

 



[i] Source : "L'artisanat culturel en Bolivie" in Défis Sud n°97 - Octobre-novembre 2010
[ii] Source : Idem.
[iii] Interviewé le 10 février 2011
[iv] Interviewé le 10 février 2011

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