jeudi 6 septembre 2012

Commerce équitable en Colombie : «Faites du café, pas la guerre»

La province de Cauca, au Sud de la Colombie, est l’une des plus pauvres du pays. Poussés par la misère, de nombreux paysans abandonnent les cultures vivrières pour cultiver la coca qu’ils revendent aux trafiquants ou  aux rebelles, au risque de mettre sérieusement en péril la sécurité alimentaire de la région.
Cette partie de la Colombie est aussi l’une des principales zones d’affrontement entre les forces gouvernementales, les paramilitaires et les FARC (qui tirent une partie de leurs revenus du narcotrafic).
Qui plus est, les cultures de coca ont des conséquences désastreuses pour l’environnement en dégradant les sols, en polluant les rivières et en encourageant la déforestation (chaque hectare de coca nécessite la destruction de quatre hectares de forêt).
L’éradication des cultures illicites est donc considérée comme une priorité, d’autant que ces cultures, en enrichissant les rebelles et les narcotrafiquants, entretiennent l’état de conflit permanent qui fragilise la région et empêche son développement.
Conscients de cette situation, l’ONU et les Etats-Unis soutiennent en 1993 la création de la coopérative COSURCA (Cooperative Association of Southern Cauca) qui regroupe des familles de producteurs, des associations locales et des collectivités avec comme principal axe de développement, la production et la commercialisation d’un café biologique et équitable de qualité.
 
Les paysans qui veulent y adhérer s’engagent à abandonner la culture de la coca en échange de quoi ils reçoivent un microcrédit initial d’environ 300 € pour éradiquer les plants illicites de leurs terres et initier d’autres cultures (de café ou de fruits par exemple)1.
La coopérative COSURCA fournit une assistance technique à ses membres, ainsi que l’accès à des banques  des semences, des formations, des microcrédits et un appui particulier s’ils souhaitent bénéficier de la certification attribuée par l’agence suisse indépendante Imo Control2.

Depuis l’année 2000, la coopérative colombienne bénéficie de la certification équitable Fairtrade grâce à laquelle les revenus des agriculteurs ont augmenté d’environ 40%.
Les efforts de COSURCA pour encourager l’abandon des cultures illicites dans la province commencent à porter leurs fruits. Depuis 1993, près de 2000 familles ont rejoint la coopérative et le nombre de ses membres
augmente chaque année. Par ailleurs, on estime que la campagne menée par la coopérative auprès des agriculteurs a permis l’éradication de centaines d’hectares de plantations de coca.
Mais les conséquences positives de cette initiative ne concernent pas que la transformation des cultures. En effet, les observateurs relèvent le fait qu’avec la reprise de relations économiques saines, un tissu social et culturel neuf se recrée. Les producteurs reprennent confiance en eux face à la guérilla et la pauvreté qui les avaient précipités dans le narcotrafic. Ils se forment, pensent et décident, ils redeviennent acteurs de leur vie et retrouvent un rôle politique et citoyen perdu dans le conflit.
La coopérative COSURCA a été nommée par l’ONU meilleure pratique permettant de dépasser le conflit colombien3.

«Avec les revenus que nous procure le commerce équitable, nous pouvons améliorer notre niveau de vie et être plus autonomes. Une des conséquences les plus importantes pour nous, c’est l’assurance que nous aurons la capacité de produire notre propre alimentation en temps de guerre. Si nous produisons beaucoup, nous pouvons stocker des céréales, des fruits et des légumes, ce qui évitera à notre peuple d’avoir à abandonner ses terres. C’est cette chance qui nous permet de vivre et de traverser une guerre qui dure depuis 40 ans».
René Ausecha Chaux, COSURCA4.



Texte : Dan Azria
Extrait de la brochure du Trade for Development Centre : "Le commerce équitable en zones de conflit", téléchargeable gratuitement sur www.befair.be, rubrique "publications"


Pour en savoir plus :
www.expocosurca.com
www.fairtradecolombia.com
www. lwr.org/colombia

1. Source : Béatrice Louis et Guillaume Mouton « Le café équitable et biologique aide à nettoyer le conflit colombien»? Projet EcoAmerica – Février 2009 - www.nature-propre.org
2. Source : www.imo.ch
3. Source : Béatrice Louis et Guillaume Mouton « Le café équitable et biologique aide à nettoyer le conflit colombien»; Projet EcoAmerica – Février 2009 - www.nature-propre.org
4. Source : « Fair Trade in Colombia : Justice in a time of war» - Lutheran World Relief - www. lwr.org/fairtrade

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